Le projet de loi discuté depuis lundi à l’Assemblée nationale vise à autoriser le Gouvernement à prendre des ordonnances modifiant, sans autre contrôle du Parlement, le code du travail. La méthode choisie par le Gouvernement est simple : demander au Parlement de lui signer un chèque en blanc pour organiser la casse du code du travail.

 

Pour justifier cette méthode, la majorité nous explique que l’urgence impose une telle précipitation. Mais où est l’urgence à diminuer le nombre de représentants de salariés dans les différentes instances représentatives au sein d’une entreprise ? Où est l’urgence à affaiblir les conventions collectives de branche, garantes de la préservation des droits fondamentaux des salariés ? Où est l’urgence à remettre en cause le compte pénibilité, qui permet aux salariés soumis à des conditions de travail difficiles de pouvoir bénéficier de davantage de protection ? Plus largement, l’urgence sociale consiste-t-elle à laisser davantage les salariés livrés à eux-mêmes ou au contraire à renforcer leurs protections face à une Finance toujours plus puissante et prête à traiter la masse salariale comme une simple variable d’ajustement ?

 

Bien loin de la prétendue nécessité de l’urgence, le Gouvernement souhaite en réalité faire passer en catimini un paquet de réformes favorisant la flexibilité des contrats et des conditions de travail au détriment de la protection des salariés, sans que le Parlement puisse avoir la moindre possibilité de questionner le bien fondé de ces réformes. C’est un véritable coup d’Etat social !

 

Pour s’en défendre, la Ministre du Travail nous explique que cette méthode fut celle de Jean AUROUX en 1982, qui organisa une réforme du code du travail par ordonnances. Par cette pirouette, Madame PENICAUD fait mine d’oublier que cette réforme a permis des avancées sociales non contestées : renforcement de la protection des salariés et de leur représentants, instauration d’une obligation annuelle de négocier, ont créé les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) que le Gouvernement entend aujourd’hui remettre en cause.

 

Face à de telles régressions annoncées, le groupe Nouvelle Gauche a annoncé qu’il voterait unanimement contre le projet de loi d’habilitation. Cette position qui est aussi la mienne ne s’inscrit pas pour autant  dans une posture d’opposant automatique qui aurait pour seul critère le fait d’être ou non dans la majorité. Si je m’oppose à ce texte, ce n’est pas en raison de ses auteurs, mais en raison des dangers qu’il fait encourir à l’ensemble des salariés de notre pays. Je n’ignore pas les nécessités d’adapter notre modèle social aux évolutions du monde. Mais c’est précisément parce que l’ultra-libéralisme devient la règle un peu partout dans le monde qu’il nous faut protéger davantage face à la flexibilité à l’outrance, et non céder au dogme de la flexibilité en prétendant qu’il s’agit d’une condition sine qua non de la protection des salariés.

 

Pour toutes ces raisons, tout comme je n’ai pas voté la loi El Khomri, et alors que la quasi-totalité des amendements que nous portions avec l’ensemble du groupe Nouvelle Gauche ont été rejetés, je ne pouvais que voter « contre » ce texte régressif au plan social.