Depuis plusieurs mois, à l’Assemblée nationale, aux côtés de mes collègues Députés Nouvelle Gauche, je dénonce le plus grand plan de licenciement jamais réalisé en France.
En à peine 6 mois, le gouvernement aura réussi à supprimer plus de la moitié des emplois aidés qui permettaient aux Français les plus éloignés du marché du travail d’accéder à l’emploi et souvent même à faire carrière, comme c’est le cas à Alfortville. 160 000 suppressions cette année, 100 000 l’année prochaine.
Tout le monde sera touché : jeunes, seniors, personnes en difficulté sociale, nous connaissons tous autour de nous, sans toujours en avoir conscience, des salariés en emploi aidé.
A Alfortville, je suis fier d’avoir, lorsque j’étais Maire, favorisé l’essor des emplois aidés et emplois d’avenir. Ils ont toujours répondu présent : pour améliorer notre cadre de vie avec l’entretien de nos espaces verts, pour faire fonctionner nos services techniques, pour assister les personnels d’éducation, pour accompagner nos séniors dans nos résidences pour personnes âgées. Dès 2013 j’avais été l’un des premiers maires à m’inscrire dans le dispositif des emplois d’avenir qui a permis à plusieurs jeunes alfortvillais de mettre le pied à l’étrier. Au nom de quel tableau de bord de Bercy, de quelle théorie libérale aurions-nous dû nous passer de ce potentiel.
Les alertes répétées des Maires, des associations, des personnels de l’Éducation nationale, des collectivités locales, du secteur de l’économie sociale et solidaire, des maisons de retraite et du secteur hospitalier n’y auront rien fait.
Non content d’attaquer en règle l’un des dispositifs les plus directs de remise à l’emploi le Gouvernement a décidé d’abaisser son financement qui passera de plus de 70% de prise en charge à 50%, dès 2018.
Récemment la ministre Pénicaud a prononcé des mots sur une radio nationale qui m’ont rappelé l’ancien monde, celui de Nicolas Sarkozy: elle ne souhaite pas de « traitement social du chômage ». Pour elle, les emplois aidés sont chers, inefficaces, et ne répondraient pas aux défis que pose les personnes éloignées de l’emploi.
Je tiens donc à rétablir un certain nombre de vérités.
Non les emplois aidés ne sont pas chers
Le journal Le Monde vient de nous révéler l’ampleur de l’évasion fiscale en France : 20 milliards d’euros partent en fumée chaque année, au détriment de notre budget. Les emplois aidés représentent à peine 10 % de cette somme.
Chaque emploi aidé coûtera toujours moins cher que les soi-disant emplois créés par la suppression de l’ISF.
Le calcul est simple à faire : Alors que le gouvernement a justifié la suppression de l’ISF en nous faisant miroiter qu’elle se traduirait par la création de 50 000 emplois, un « emploi ISF » coûtera demain 10 fois ce que coûtait un emploi aidé hier, soit 70 000 euros/an pour les premiers contre 7000 euros/an pour les seconds.
Oui les emplois aidés sont efficaces
Le gouvernement accuse les emplois aidés d’être inefficaces en ne permettant pas de pérenniser le retour à l’emploi. Rien n’est plus faux ! Ignore-t-on au ministère du Travail que tous les types de contrats aidés comprennent désormais un volet formation renforcé, que par exemple 3 jeunes sur 4 en emplois d’avenir en bénéficient ?
Les emplois d’avenir crées par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault ont permis de faire baisser pour la première fois depuis une décennie le chômage des jeunes. Lorsque j’étais Maire d’ Alfortville, j’ai pu constater par moi-même ce que ces emplois ont rendu de fierté et d’espoir aux familles.
La ministre Pénicaud n’a-t-elle pas lu les rapports de ses propres services comme la DARES qui prouvent que plus de deux tiers des contrats aidés sont transformés en recrutements dans le privé et les associations. Ne sait-elle pas qu’ils sont près d’un sur deux dans le secteur public ?
Oui les emplois aidés sont une aubaine pour les entreprises du secteur privé
Le 10 août dernier, en réponse à l’inquiétude des élus de la Réunion, la ministre du Travail a expliqué aux députés que les emplois aidés généraient de vrais effets d’aubaine pour les entreprises privées.
Elle a raison. Mais dans ce cas il suffisait de supprimer les 60 000 emplois du secteur marchand qui n’en avait pas besoin. Pourquoi ne pas l’avoir fait ?
Où est la cohérence à annoncer alors 20 000 emplois francs qui profiteront d’abord au secteur privé sans aucune garantie sur la réussite du dispositif et sa capacité à insérer les habitants des quartiers prioritaires. Et surtout sans limiter les effets d’aubaine ?
Nous devons nous poser les vraies questions
Avec les élus du groupe Nouvelle Gauche, nous voulons poser les vraies questions : quelle place accorderons-nous demain aux demandeurs d’emplois les plus fragiles de notre société ? Que proposera-t-on dès le 1er janvier 2018 aux 2.5 millions de personnes éloignées du marché de l’emploi qui ne trouveront tout simplement pas de travail autrement et que la reprise économique actuelle ne suffira pas à sortir d’affaire ?
Le grand plan pour la formation du gouvernement ne convainc pour l’instant pas les partenaires sociaux. Il ne produira ses effets que dans plusieurs années. Que dirons-nous demain à celles et ceux qui se retrouveront sans emploi et sans perspective du jour au lendemain et que la seule perspective d’une formation à moyen terme n’aidera à payer ni les factures, ni le loyer ?
Nous ne devons pas céder à la déshumanisation ambiante de notre société.
Nous avons besoin de tous ces aidants qui servent à manger chaque jour dans nos cantines à nos enfants, qui accompagnent les enfants handicapés, qui améliorent le quotidien de nos personnes âgées souvent seules au soir de leur vie.
Nous avons besoin de ces aidants qui préparent des repas jour et nuit pour les plus démunis. Le gouvernement ne doit pas rester sourd à la plainte du responsable de l’antenne Les Restos du Coeur de la Ville de Grenoble qui s’inquiétait début septembre de ne plus pouvoir distribuer de repas chauds faute d’avoir pu reconduire le contrat aidé de son cuisiner.
Les emplois aidés sont le chaînon manquant entre les premiers de cordée et les Français qui dévissent. Nous devons prendre soin de ces Français qui prennent soin des Français.