Nous, associations de lutte contre l’infertilité, citoyens engagés en faveur de l’égalité des droits, demandons que le débat qui va s’ouvrir à l’occasion de la révision des lois de bioéthique soit un véritable débat, et de ce fait, inclue la gestation pour autrui (GPA). En effet, cette dernière fait partie des techniques d’assistance médicale à  la procréation selon l’Organisation mondiale de la santé, qui en a donné une définition précise.

1. Les enfants nés par le recours à la GPA sont là Ils ont des parents, hétérosexuels ou homosexuels. Ils sont des milliers, de plus en plus visibles, on ne peut plus les ignorer comme des fantômes et faire comme s’ils n’existaient pas. On ne peut pas continuer à bafouer leurs droits en ignorant les jugements de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), qui ne cesse de condamner la France. La Cour de cassation a proposé une voie discriminante à l’égard des femmes qui ne peuvent porter un enfant puisqu’elle les efface purement et simplement de l’acte de naissance transcrit (filiation paternelle exclusivement reconnue). Pourquoi les adaptations juridiques tenant compte des condamnations de notre pays par la CEDH pour manquement aux droits de l’homme devraient-elles être apportées uniquement par les juges ? C’est ici le rôle et la responsabilité du législateur, en relation avec la société, de faire évoluer le droit. Nous demandons la transcription intégrale à l’état civil français de la filiation de l’enfant établie légalement à l’étranger à l’égard de ses parents. Les Français y sont favorables dans leur écrasante majorité (71  % –  sondage IFOP, juin  2017).

2. Il faut lutter efficacement et avec détermination contre les dérives de la GPA et les mafias qui en profitent, au-delà de la réforme urgente qu’appellent les droits fondamentaux des enfants à leur filiation. Nombreux sont ceux, en France, qui s’alarment à juste titre de la marchandisation et de la réification dont peuvent être victimes des femmes pauvres dans certains pays, mais aussi des parents d’intention qui se font maltraiter et des enfants qui peuvent se retrouver dans des tourments dramatiques. Eh bien, combattons ces situations odieuses ! A l’image de la convention de La  Haye encadrant l’adoption internationale et luttant contre les trafics d’enfants, nous prônons une convention internationale sur la GPA, condamnant de façon efficace toutes les atteintes aux droits -fondamentaux des personnes, seul moyen de lutter contre les situations où la dignité des femmes et la sécurité des enfants ne sont pas respectées.

3. Enfin, il est temps d’ouvrir sur la GPA en général un débat serein, argumenté et informé Il existe dans de grandes démocraties des protocoles de GPA pensés et aménagés de façon parfaitement éthique, et dont les pratiques sont étayées par des études validées. Plusieurs pays voisins, comme le Royaume-Uni, les Pays-Bas, le Portugal, la Grèce, ont déjà débattu et même légalisé la GPA sur leur sol. Aujourd’hui, la réalité des nombreux témoignages vient -contre-dire les fantasmes brandis par certains. Les controverses sur la GPA transcendent les appartenances politiques ; mais nous savons aussi que ses adversaires les plus acharnés sont souvent ceux qui se sont opposés naguère à la contraception, à l’interruption volontaire de grossesse, à la procréation médicalement assistée (PMA). Nombre d’entre eux n’acceptent toujours pas l’homoparentalité, alors que la loi de 2013 a tranché. Le -Conseil constitutionnel l’a rappelé : rien dans le droit ne prescrit que la filiation doive imiter la nature. Nous disposons des moyens de débattre de façon apaisée grâce aux témoignages des personnes concernées, des enfants ainsi nés, des études faites par les chercheurs et des associations spécialistes.

Aujourd’hui, nous demandons une réforme urgente sur la transcription de la filiation, une implication de la France dans une convention internationale contre les atteintes aux droits des personnes, et un vrai débat de fond sur la GPA, au nom des enfants qui en sont nés à l’étranger, au nom de leurs familles et amis, au nom des associations que nous représentons, au nom des experts et personnalités signataires de ce texte, au nom du principe de réalité, au nom de la dignité des personnes considérées. L’opinion publique est prête. Les Français vont même plus loin que la -demande exprimée dans cette tribune : ils sont 64  % à envisager une forme de légalisation de la GPA, selon le dernier sondage IFOP pour La Croix et le Forum européen de bioéthique de janvier  2018, confirmant une tendance favorable -depuis dix ans.

Les 110 premiers signataires :
Michèle André sénatrice honoraire, ancienne Ministre
Elisabeth Badinter philosophe
Bernard Baertschi philosophe
Sophie Bajos de Heredia journaliste
Laurent Barry anthropologue, maitre de conférence à l’EHESS
Régine Barthelemy avocate, membre du Conseil national des Barreaux 
Alex Beaupain auteur compositeur interprète 
Alain Beit président du Beit Haverim
Jérôme Berthoud comédien
Erwann Binet député honoraire
Serge Blisko député honoraire
Geneviève Brisac écrivaine
Fabienne Brugère philosophe, professeure à l’Université Paris VIII
Laurence Brunet juriste, chercheure à l’Université Paris I
Olivier Cadic sénateur 
Anne Cadoret anthropologue
Laure Calamy actrice
Cléo Carastro anthropologue, maitresse de conférences à l’EHESS
Gauthier Caron-Thibault conseiller municipal, Paris 3ème arrdt.
Luc Carvounas député du Val-De-Marne
Céline Cester présidente Les Enfants arc-en-ciel l’Asso!
Jonathan Chalier secrétaire de rédaction, revue Esprit
Joan Charras-Sancho théologienne protestante, chercheure associée à l’Université de Strasbourg
Ladislas Chollat metteur en scène
Jerôme Courduriès anthropologue, maître de conférences à l’université Jean-Jaurès Toulouse
Yeshaya Dalsace rabbinVincent Dedienne humoriste, comédien
Genevieve Delaisi de Parseval Psychanalyste, spécialiste de bioéthique
Géraud De Lapradelle juriste, professeur à l’Université Paris X
Corinne Ehrenberg psychanalyste 
Alain Ehrenberg sociologue, directeur de recherche au CNRS 
Annie Ernaux écrivaine
Jean-Louis Fabiani sociologue, directeur d’études à l’EHESS 
Anne Fagot-Largeault professeur au Collège de France
Jeanne Favret-Saada anthropologue, directrice de recherche honoraire au CNRS
Rémi Féraud sénateur Agnès Fine anthropologue, directrice d’études à l’EHESS
Christine Frey conseillère régionale Île-de-France
Frédérick Getton président de Centr’Egaux
Maurice Godelier anthropologue, médaille d’or du CNRS
Fabien Gorgeart cinéasteBlandine Grosjean journaliste productrice
Michael Grynberg chef du service de médecine de la reproduction, hôpital A. Béclère, Clamart
Juliette Guibert gynécologue
Martine Gross sociologue, chercheure au CNRS
Daniel Guerrier biologiste, chargé de recherche à l’INSERM
Serge Hefez psychiatre psychanalyste
Laurence Herault anthropologue, professeure à l’université d’AIx-Marseille
Clément Hervieu-Léger sociétaire de la Comédie-Française
Danièle Hervieu-Léger sociologue, directrice d’études émérite à l’EHESS
Clotilde Hesme actrice
Christophe Honoré cinéaste
Fabien Joly avocat
Bruno Juliard premier adjoint à la Maire de Paris
Lea Karpel psychologue clinicienne, hôpital Foch Suresnes
Matthieu Klein président du Conseil Départemental de Meurthe-et-Moselle
Delphine Lance anthropologue, doctorante à l’EHESS
Catherine Laulhère éditrice, écrivain
Xavier Legrand cinéaste
Sophie Leux présidente de Stop Homophobie
Germain Louvet danseur étoile au ballet de l’Opéra national de Paris
Clara Luciani chanteuse 
Agnès Martial anthropologue, directrice de recherche au CNRS
Caroline Mécary avocate
Sylvie Mennesson co-présidente et co-fondatrice Association CLARA
Dominique Mennesson co-président et co- fondateur Association CLARA
Jennifer Merchant américaniste, professeure à l’université Paris II
Catherine Michaud présidente de GayLib, Conseillère municipale Paris 2ème arrdt. 
Alain Milon sénateur
Jacques Milliez membre de l’Académie Nationale de Médecine
Pierre-André Moretti notaire
Janine Mossuz-Lavau politiste, directrice de recherche émérite au CNRS
Karine Morcel gynécologue obstétricienne
Israel Nisand gynecologue obstétricien, directeur du Forum Européen de Bioéthique
Dominique Noguez écrivain
François Olivennes gynecologue obstétricien
Bernard Paniel chef du service de gynécologie, hôpital de Créteil
Michelle Perrot historienne, professeur émérite à l’université Paris VII
François Pierucci cadre dans l’industrie numérique
Claude-Alain Planchon médecin, écrivain
Laëtitia Poisson-Deleglise présidente de l’Association MAIA
Enric Porqueres I Gené anthropologue, directeur d’études à l’EHESS
Charlotte Prévot philosophe
Sabine Prokhoris philosophe, psychanalyste
Denis Quinqueton président de Homosexualité et Socialisme
ChristineRevault-d’AllonnesBonnefoy députée européenne
Muriel Robin humoriste, comédienne
Jean-Luc Roméro conseiller régional Ile-de-France
Laurence Roques présidente du Syndicat des Avocats de France
Pierre Rosanvallon professeur au Collège de France
Elisabeth Roudinesco historienne de la psychanalyse
Carine Ruszniewski productrice
Fabienne Servan-Schreiber réalisatrice, productrice
Martha Spranzi philosophe, centre d’éthique clinique de l’hôpital Cochin 
Alfred Spira membre de l’Académie Nationale de Médecine
Suzanne Srodogora conseillère grands projets, Institut de la Vision, Paris.
Olivier Steiner écrivain, producteur radio
Irène Théry sociologue, directrice d’études à l’EHESS
Mathias Théry cinéaste, documentariste
Françoise Thouin-Palat avocate au Conseil d’Etat et Cour de Cassation
Laurent Toulemon démographe, directeur de recherche à l’INED 
Alexandre Urwicz président de l’Association Des Familles Homoparentales
Dominique Versini ancienne Défenseure des enfants 
Amélie Victor présidente association MRKH 
Alain Vogelweith magistrat
Stéphane Viville praticien hospitalier, professeur à l’université de Strasbourg
Mâkhi Xenakis artiste, auteure
Ludovic-Mohamed Zahed Dr. et Imam, Recteur de l’Institut CALEM Marseille
Richard Zloto président des Enfants de Cambacérès
Marina Zuccon présidente du Carrefour des chrétiens inclusifs