Aujourd’hui la majorité En Marche à l’Assemblée nationale a décidé de voter l’ensemble de la loi Evolution du Logement et Aménagement Numérique (ÉLAN)
Avec mes collègues Députés Nouvelle Gauche mais aussi avec ceux du PCF – Parti Communiste Français et de la La France insoumise, j’ai voté contre ce projet de loi qui constitue une attaque inédite contre le logement social.

Si de rares dispositions de la loi, telles que la transformation des bureaux vacants en logements ou la lutte contre les marchands de sommeil vont dans le bon sens, la loi ELAN creuse d’abord et avant tout la tombe du logement social qui permet aujourd’hui à 11 millions de Français de se loger décemment à un prix abordable.

En matière de logement, tous les Français que je rencontre ne demandent que deux choses :
1. Avoir un logement décent à un prix abordable.
2. Pouvoir emménager dans un nouveau logement sans s’expatrier loin des leurs lorsque leur situation évolue.
La loi ELAN ne répond ni à l’une ni à l’autre de ces demandes.
Cette loi est censée provoquer un «choc d’offre» pour favoriser la création de logements et faire baisser les prix. Mais elle a d’abord démontré une fois de plus le mépris avec lequel la majorité et le gouvernement traitent l’opposition.

La loi ELAN ça commence en effet par une procédure accélérée qui bride une fois de plus les parlementaires, c’est 50 heures de débat pendant lesquels le groupe Nouvelle Gauche n’a eu la parole que moins de 10% du temps, ce sont des séances de nuit décidées à la va-vite durant lesquelles nous avons dû défendre des acquis aussi importants pour la mixité sociale que la loi SRU (pendant que des députés de la majorité ont tenté de la remettre en cause), ce sont des centaines d’amendements que nous portions pour plus mixité ou un meilleur contrôle des ventes de logements aux fonds de pension qui ont été balayés d’un revers de la main par les co-rapporteurs ou par le gouvernement… et la liste pourrait être plus longue.
Mais le plus grave tient au fait que cette loi a une fois de plus confondu l’intérêt général avec les intérêts privés. Cela devient une (mauvaise) habitude pour ce gouvernement.

En France chaque année ce sont près de 2 millions de Français qui sont en attente d’un logement social et selon la Fondation Abbé Pierre, près de 4.5 millions de Français sont mal logés. La situation est encore plus grave en Ile-de-France où le problème du logement se cumule aux temps de trajets toujours plus longs entre le domicile et le travail et aux retards des transports en commun.
Oui notre conviction est que la question du logement mérite mieux qu’une loi écrite pour libéraliser en catimini l’un des secteurs les plus sensibles de notre économie qui touche les Français au plus près de leur quotidien et de leur pouvoir d’achat.
En réduisant les APL et en demandant aux bailleurs sociaux de supporter cette baisse, le gouvernement avait dès cet été préparé le premier acte de la loi ELAN : Briser les bailleurs pour les pousser ensuite à se regrouper ou a se tourner vers le privé.
Alfortville, notre bailleur Logial-OPH perd dès à présent 1.7 millions d’euros par an qui l’empêchent de construire près de 100 logements chaque année alors que le besoin de logements en Ile-de-France n’a jamais été aussi criant.
Avec la loi ELAN, le gouvernement n’a pas franchi une mais plusieurs lignes rouges supplémentaires : car la loi qui ne prévoit aucun mécanisme de durcissement des sanctions pour les villes qui ne respectent pas la loi SRU (obligation pour les villes de détenir plus de 25% de logements sociaux) permettra dorénavant la vente en blocs de logements sociaux pour des bailleurs qui auront de plus en plus de mal à entretenir leur patrimoine.
Elle exclut en plus les maires, qui n’ont même pas été consultés du droit de regard légitime qu’ils doivent porter sur un patrimoine souvent essentiel au vivre ensemble sur leur commune.
Dans les villes qui ne respectent pas leurs engagements en matière de logements sociaux mais préfèrent payer des amendes, ces ventes seront une aubaine pour les promoteurs, les banques ou les fonds de pension.

J’ai soutenu avec mes collègues la possibilité pour les maires de préempter au moins la vente de ces logements, mais quels seront nos moyens demain alors que l’Etat qui peine à boucler ses fins de mois exige 10 milliards d’euros d’économies supplémentaires aux collectivités sur leurs budgets ?

Le plus grave est que ces ventes pourront dorénavant se faire à prix cassé par des bailleurs soumis aux pressions des acquéreurs.
Ce qui est désormais En Marche dans nos villes c’est la privatisation du logement social.
Parce que nous sommes restés vigilants, nous avons fait reculer le gouvernement sur sa volonté de livrer le littoral aux promoteurs immobiliers et aux spéculateurs ; la loi Elan prévoyait en effet de «remplir» tous les espaces en front de mer qui ne l’étaient pas déjà. Belle conception de la loi Littoral qui préserve nos côtes depuis les années 1980. Mais nous n’avons été entendus qu’à moitié et la vigilance doit rester de mise.
Je regrette enfin que nous n’ayons pas réussi à faire entendre raison au gouvernement pour maintenir le niveau actuel de normes d’accessibilité pour les personnes en situation de handicap, le gouvernement ayant décidé de faire passer ce taux de 100% à…10% !

A Alfortville, nos 8000 logements sociaux sont répartis dans toute la ville, et notre fierté est d’être parvenus à réduire de moitié en moins de dix ans, le nombre de logement sociaux dans notre quartier Chantereine avec l’appui de notre bailleur social LOGIAL-OPH. Nous y sommes parvenus parce que nous avons été soutenus par des bailleurs sociaux qui ont accepté de jouer le jeu de la mixité.
Nous y sommes parvenus parce que notre bailleur avait une taille humaine qui lui permet de comprendre les enjeux d’un territoire loin des logiques purement comptables. La loi ELAN nous impose dorénavant de nous regrouper pour atteindre une taille critique permettant de créer des géants du logement social qui compteront au moins 15 000 logements aujourd’hui peut-être le double ou le triple demain et dont les centres de décision s’éloigneront des locataires.
Une chose est sure : avec la loi ELAN et les mesures qui frappent les bailleurs sociaux depuis l’été 2017, nous ne serions jamais parvenus à transformer nos quartiers et à garantir la mixité comme nous l’avons fait ces dix dernières années.
D’une manière générale, la Gauche n’a pas à rougir de son bilan en matière de logements : ces cinq dernières années, nous avons renforcé la loi SRU qui a porté la part des logements sociaux obligatoire à 25% dans les villes ; nous avons vraiment facilité la construction de logements neufs, en mettant notamment à disposition des villes des terrains qui appartenaient à l’Etat et qui ont permis de construire plus de 12 000 logements sociaux en Ile-de-France.
A partir de 2015, notre action a permis de construire près de 400 000 logements sur toute la France !
Nous avons tant bien que mal contenu les loyers sur Paris grâce à notre mesure d’encadrement et nous avons facilité les locations pour les étudiants et les jeunes de moins de 30 ans avec le dispositif Visale.
Cette politique a souvent été décriée par ceux-là même qui se félicitent aujourd’hui de la grande braderie que le gouvernement s’apprête à réaliser sur notre patrimoine.
Pour un parlementaire de Gauche, ce mardi 12 juin restera le jour où dans un même élan, le gouvernement sera parvenu à privatiser le logement social et rendre privatisable la SNCF.
Aujourd’hui, c’est une défaite pour tous les Français qui croient encore en un Etat fort et protecteur. Les services publics sont le patrimoine de ceux qui n’en ont pas ! Préservons-les.

Source : Facebook